"Nous avons décidé de développer le sport-santé, c'est notre défi des années à venir "
C'est au centre nautique de l'Île-Tudy que le navigateur Vincent Riou a tiré ses premiers bords. Une école de voile pionnière que dirige, depuis 2014, André Le Goff, fils de marin-pêcheur, enfant des rias.
Le centre nautique de l'Île-Tudy fut l'un des premiers à être créés en Finistère. Quelle est son histoire si particulière ?
L'Union nautique populaire Quimper-Île-Tudy, qui deviendra plus tard le centre nautique de l'Île-Tudy, a été créé à l'initiative de la Mairie de Quimper en 1961. Il s'agissait de faciliter l'accès des jeunes Quimpérois aux activités nautiques, dans l'esprit de l'éducation populaire. Le projet a été confié à Bob Trévien, ancien Résistant, personnage emblématique de la structure. Jusqu'alors la voile et le yachting étaient réservés à une certaine élite. C'est après-guerre que le nautisme a commencé à devenir un peu plus populaire, l'école de voile des Glénans est ainsi née en 1947. La mairie de l'Île-Tudy, convaincue de l'intérêt du projet, a rapidement mis à disposition de l'association les bâtiments nécessaires pour pouvoir développer l'activité.
Au fil des années, l'esprit qui animait le projet de départ a-t-il perduré ?
Tout à fait. À partir des années 1967-68, toujours dans un esprit égalitaire, ils développent le secteur des classes de mer. Les valeurs que l'on transmet à travers l'enseignement de la voile sont diverses : développer l'esprit d'entraide, la solidarité. Car outre les rudiments de la navigation, il fallait aussi gérer les corvées, la vie collective. La classe de mer telle qu'imaginée par Jacques Kerhoas, son fondateur, correspondait à l'idée de faire découvrir aux enfants la mer, de déplacer la salle de classe, d'apprendre en travaillant dans un autre contexte.
Vous êtes originaire de Moëlan-sur-Mer. Vous souvenez-vous de vos premiers bords et de vos premières années d'apprentissage ?
Il y avait un très gros centre nautique, à côté de chez nous, qui s'appelait Rosbras-Brigneau, l'un des plus importants de France, que je ne fréquentais absolument pas. Je suis fils de marin-pêcheur et les relations entre les marins-pêcheurs et le centre nautique n'étaient pas des meilleures. Ces deux mondes différents s'observaient et tenaient leurs distances. Alors que j'étais étudiant en droit, je me suis acheté une planche à voile. C'est donc un démarrage sur le tard. Un copain m'a encouragé à passer le monitorat de voile. Dans la foulée, un poste d'éducateur en milieu marin s'est libéré au centre nautique de Rosbras-Brigneau. Très vite, je me suis aperçu que si je souhaitais avoir un travail à l'année dans ce genre de structure, il fallait que je me forme et que je passe le Brevet d'état. Ce qui fut chose faite en 1988.
Vous prenez ensuite, rapidement, la direction du centre nautique de Sainte-Marine. L'époque était alors propice au développement du nautisme.
Je suis arrivé au moment où les Livres bleus du nautisme commençaient à être mis en place par le conseil général du Finistère. Des centres nautiques pouvaient recevoir des aides pour embaucher des permanents en vue de développer leur activité. J'ai postulé, j'ai été retenu par le centre nautique de Léchiagat et mis à la disposition du centre de Sainte-Marine. Pendant un an et demi, j'ai partagé mon temps entre les deux structures. J'ai ensuite eu la possibilité de choisir et j'ai obtenu un temps plein au centre nautique de Sainte-Marine de 1990 à 2004. C'est en 2004 que j'ai rejoint l'Île-Tudy.
Quelles sont les particularités du centre nautique de l'Île-Tudy aujourd'hui ?
On est un gros centre de classes de mer et l'on essaie de travailler d'une façon moderne mais dans la continuité de l'esprit des anciens. Il est important de continuer à préserver certaines valeurs, comme l'acquisition de connaissances et la solidarité. La classe de mer d'aujourd'hui n'a pas grand-chose à voir avec celle des années 1970 mais l'esprit reste le même. La moyenne des séjours est désormais d'une semaine, au lieu des trois semaines autrefois. Mais la découverte du milieu, des gens de mer, et de la vie en collectivité demeure. C'est souvent la première fois, pour la plupart des enfants, qu'ils quittent leurs parents. Nous accueillons à l'année une soixantaine de classes de mer.
Été comme hiver, le club propose différentes activités.
Nous poursuivons en effet toutes les activités de pratique de la voile classiques durant l'été ainsi que les activités de club l'hiver comme la planche à voile, la voile, et la marche aquatique depuis 2011. Nautisme en Bretagne avait organisé dans les années 2010 un colloque à Briec où l'on nous avait présenté trois nouvelles activités : le sauvetage côtier, le paddle board et la marche aquatique. J'ai tout de suite adhéré à cette dernière en pensant que nous allions toucher un nouveau public. C'est une activité qui a commencé avec une quinzaine de personnes. Très rapidement, nous avons doublé les créneaux. Quatre-vingts personnes sont inscrites à l'année. C'est un phénomène assez prodigieux.
Quels sont les projets en cours qui vous tiennent particulièrement à cœur ?
À l'image de la marche aquatique, nous avons décidé de développer le sport-santé. Nous sommes très peu de structures nautiques à investir ce champ-là pour l'instant. Lors d'une réunion organisée par Finistère 360, fin 2018, nous avons rencontré des collègues de structures nautiques, des médecins, des agences régionales de santé qui ont exprimé une forte demande à savoir que les clubs sportifs s'impliquent dans ce que l'on appelle le sport adapté afin de répondre à des enjeux de santé publique. Ce qui correspond à notre éthique et aux valeurs que nous défendons au quotidien. Cela nous semble extrêmement intéressant. Nous sommes en train de mettre en place différents projets. C'est notre défi des années à venir.