"Être acteur de la transition écologique"
Anne-Cécile Daniel est ingénieur en horticulture et paysage, également coordinatrice de l’Association française de l’agriculture urbaine professionnelle.
Quel est votre parcours ?
Je suis Anne-Cécile Daniel, j'habite à Combrit dans le Finistère. J'ai co-fondé, en 2016, l'Association française de l'agriculture urbaine professionnelle (Afaup) dans laquelle je suis actuellement la coordinatrice.
Qu'est-ce que l'Afaup ?
L'Afaup, c'est une association qui fédère aujourd'hui plus de 80 professionnels qui développent les différents projets d'agriculture urbaine partout en France. Elle représente 600 salariés, 600 sites de production pour un total de 76 hectares d'agriculture. C'est un tout petit chiffre, nous ne nourrirons pas la ville mais nous sommes bien complémentaires des autres agricultures. Nous communiquons aussi sur ce qu'est l'agriculture urbaine et nous accompagnons le mouvement en sensibilisant les élus, les services des collectivités, les urbanistes, les écoles et le monde agricole, sur les impacts positifs de l'agriculture urbaine.
Qu'est-ce que l'agriculture urbaine ?
L'agriculture urbaine, c'est remettre au goût du jour le jardinage et l'agriculture. C'est reconnecter les urbains entre eux et avec leur alimentation, c'est planter et végétaliser des interstices de la ville, c'est soigner les villes et soigner les gens. Nous cultivons dans les délaissés des villes, caves, jardins, balcons, toiture, mais aussi dans les espaces périphériques de la ville. L'objectif est de sensibiliser, produire et manger local.
Comment cet engagement s'exprime-t-il en Finistère ?
En Finistère, les premiers projets sont nés au travers d'initiatives citoyennes, comme les jardins familiaux, les jardins partagés, le mouvement des incroyables comestibles. En Finistère, mais également partout en France. Il y a également des jardins d'insertion professionnelle comme la Ferme de la Coudraie à Quimper. Elle emploie des personnes en parcours d'insertion professionnelle pour son activité de maraîchage. Elle fournit des légumes frais à ses adhérents mais aussi à leurs boutiques, en semi-gros, à des restaurants, à des crèches... C'est vraiment une activité de production, en ville et pour les habitants des villes. Depuis peu, nous voyons apparaître des micro-fermes urbaines : des lieux où l'on va trouver une activités agricoles comme dans une ferme classique, mais elle ne va pas être l'activité principale. D'autres activités sont proposées, comme celle de bricoler, apprendre à jardiner, à composter, boire un verre, rencontrer des personnes. Ce sont des lieux très ouverts, accessibles à tous, avec une très forte valeur sociale et écologique. C'est le cas de la Ferme de Raymonde à Brest, où la future micro-fermes urbaine crée par l'association Ty-Pousse à Quimperlé et qui est très prometteuse. Pour ces projets, l'implication du propriétaire et de la ville sont indispensables pour leur pérennité. Ce sont vraiment des lieux co-construits entre la ville et les porteurs de projets qui ont envie de faire revivre des espaces en ville.
Est-ce une tendance créatrice d'emplois ?
Dans notre réseau, nous dénombrons une centaine de création d'emplois par an. En réalité, si l'on prend en compte tous les territoires et les petites villes, c'est même beaucoup plus. Ce qui nous intéresse, au-delà de la création d'emploi, c'est de toucher un maximum de personnes et les inciter progressivement à manger local, à cultiver leur jardin. Tout simplement être acteur de la transition écologique. C'est aussi un super outil pour préparer le renouvellement des générations en agriculture puisque 40% des agriculteurs partiront à la retraite d'ici 10 ans. Nous allons devoir trouver de nouveaux porteurs de projets, de nouveaux agriculteurs et ils viendront peut-être de la ville. On voit aujourd'hui certains agriculteurs urbains commencer à chercher à s'installer à la campagne et ça peut être une perspective très positive pour le monde agricole.
En Finistère, il y a de vraies perspectives de développement et cela se fera aussi en lien avec les agriculteurs puisque actuellement les agriculteurs sont déjà très connectés aux villes. On compte de nombreuses formes de circuits courts.
Comment chacun peut-il contribuer à ce mouvement ?
On peut créer un jardin collectif avec ses voisins, s'inscrire à des cours de jardinage, s'inscrire sur une plate-forme de compostage, devenir bénévole dans une ferme urbaine ou tout simplement dans une ferme plus rurale. Surtout consommer local et pourquoi pas devenir un jour agriculteur paysan ou agriculteur urbain.