Interview : Jean-Jacques Le Gall, producteur de fraises à Savéol

Fraise de Plougastel, zéro pesticide, confinement...

Producteur et responsable de la filière fraise chez Savéol, Jean-Jacques Le Gall perpétue un savoir-faire ancestral tout en le modernisant et l'adaptant aux contraintes contemporaines. Sous serre, sur les terres familiales à Plougastel-Daoulas, il prend soin de ses hectares de fraise.

À 90 %, la production de la fraise à Plougastel se fait désormais en hors-sol ou "jardins suspendus" selon l'expression imagée d'un journaliste adoptée par les cultivateurs. Pourriez-vous nous expliquer en quoi consiste ce mode de culture ?

C'est très simple. Le hors-sol, nous l'avons mis en place principalement pour une question d'ergonomie de travail. Les générations de mes parents et de mes grands-parents ont travaillé la fraise à genoux dans les champs. Ce n'est plus acceptable pour des salariés. Le hors-sol permet de travailler debout.

D'autre part, on utilise des substrats organiques à base de tourbe et d'écorce de pin. Cela nous permet de maîtriser totalement le processus de l'irrigation. Le substrat est neutre, ainsi nous contrôlons ce que l'on apporte à la plante au moment exact où elle en a besoin. Et l'intérêt, c'est que l'on change de sol, de substrat, tous les ans. Les substrats sont recyclés, récupérés par l'entreprise qui nous les vend. Tout ce que la plante trouve naturellement dans le sol, nous le lui apportons sous forme de solution composée d'eau et d'éléments nutritifs, de la potasse, de l'azote, du fer, du calcium.

Vous vous êtes engagés, au sein de la coopérative Savéol, sur la voie du zéro pesticide. Quelles méthodes employez-vous ?

Nous avons un bel élevage de bourdons. Nous produisons tout de même 15 à 16 000 ruches par an. Et ces bourdons fécondent toutes les serres en tomates et en fraises. À partir du 15 janvier, à l'arrivée des premières fleurs, on les libère dans les serres. C'est pour cela que nous obtenons des fraises très régulières. Parce que les conditions de fécondation sont meilleures. L'air est plus sec. Il n'y a pas de pluie, il n'y a pas de vent.

On est également passé en lutte biologique. Comme on a des bourdons, on ne peut pas se permettre d'employer des traitements chimiques. Les insectes officient à leur place. Et nous utilisons également depuis quelques années des répulsifs à insectes à base d'extraits de plantes. De la fleur à la récolte, aucun traitement n'est effectué. 

La fraise de Plougastel est-elle une marque ?

Nous avons lancé un projet d'Indication géographique protégée (IGP) il y a deux ans. Ce sont les producteurs indépendants qui y ont d'abord réfléchi et qui ont travaillé la question. Nous les avons rejoints et nous avons monté une association soutenue par la mairie de Plougastel-Daoulas et Brest Métropole. Si on l'obtient, ce sera la première IGP avec de la culture hors-sol. Nous avons une belle et longue histoire à raconter. On reviendrait sur la carte géographique historique couvrant les communes de Plougastel, Loperhet, Dirinon, L'Hôpital-Camfrout et Logonna.

Comment avez-vous vécu ce printemps ?

Nous sommes vingt-neuf producteurs de fraises à Savéol. Environ huit cents cueilleurs travaillent tous les jours, ce qui correspond à quinze personnes par hectare. À l'annonce du confinement, nous avons ressenti les effets de la panique. Les gens achetaient plutôt des pâtes, des conserves, de la farine… Le premier vendredi, quand il nous restait vingt tonnes à vendre, je suis parti avec mon fourgon les distribuer à la maison de repos et de convalescence de Ty-Yann et à l'hôpital de la Cavale Blanche à Brest.

Toute notre stratégie pour la campagne 2020 a été mise à plat. Heureusement les consommateurs ont joué le jeu. Nous avons réussi à vendre la semaine suivante nos 150 tonnes. L'import a été arrêté, ce qui correspond à une fraise sur deux à cette époque-là. La situation a basculé en trois, quatre jours. Les magasins ont joué le jeu aussi. Il y a eu une grosse solidarité. C'est ce qui a sauvé la campagne de la fraise. Et la saison a finalement été plutôt bonne pour les producteurs français. On respire ! Mais il a fallu être réactifs. Et puis il semblerait que de nombreux enfants aient voulu préparer des charlottes aux fraises, les familles ont donc acheté plus de fraises, ce qui a compensé en partie ce qui ne s'est pas vendu en restaurant.

Quelles variétés sont cultivées ?

On travaille la gariguette, la fraise la plus précoce en France, et depuis trois ans la mariguette, un croisement entre la gariguette et la mara des bois un peu plus sucrée qui produit de mai à septembre. Donc à Savéol, on a de la fraise de mars à septembre-octobre.

Quelles variétés sont cultivées ?

On travaille la gariguette, la fraise la plus précoce en France, et depuis trois ans la mariguette, un croisement entre la gariguette et la mara des bois un peu plus sucrée qui produit de mai à septembre. Donc à Savéol, on a de la fraise de mars à septembre-octobre.

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